Projet de loi PACTE : gouvernance des entreprises

Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises Le projet de loi PACTE (plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises) est sorti de l’Assemblée nationale pour être examiné par le Sénat. On trouvera ici le récapitulatif (à date du 09/10/2018) des articles de ce projet,  avec une analyse plus approfondie des suites données (ou pas) au rapport Notat-Senard (L’entreprise, objet d’intérêt collectif, mars 2018). Le rapport Notat-Senard avait fait l’objet de mes articles Société à objet social étendu (SOSE) (voir aussi AEC droit des entreprises et bien commun ) et  Rapport Notat Senard 03/2018  Pour une analyse plus approfondie de l’ensemble du projet de loi PACTE, voir mon blog Hyperion LBC, dont est extrait ce qui suit. Le projet de loi, passé de 73 à 195 articles lors de l’examen par l’Assemblée nationale, devrait être promulgué au premier trimestre 2019 après son passage au Sénat. Ce texte, compte tenu de sa nature très disparate en forme de cavalier budgétaire, mériterait le nom de “paquet” au sens bruxellois du terme, plus que de loi. 1/ Le paquet PACTE Le dossier législatif AN 1088 contient l’exposé des motifs du Gouvernement, le projet de loi soumis à l’Assemblée nationale (pp.80 à 240) ainsi que l’étude d’impact. La nomenclature du projet de loi est la suivante (les intitulés sont parfois simplifiés, se reporter au dossier législatif pour les intitulés exacts) : CHAPITRE I Des entreprises libérées Section I Création facilitée et à moindre coût Article 1er création d’un guichet unique électronique pour l’accomplissement des formalités liées à la création et à la vie des entreprises Article 2 création d’un registre des entreprises Article 3 réforme des publications d’annonces légales Article 4 suppression de l’obligation de suivre le stage de préparation à l’installation Article 5 mesures diverses en faveur de l’artisanat et des entreprises artisanales Section II Simplifier la croissance de nos entreprises Article 6 regroupement, ajustement et simplification des seuils d’effectifs Article 7 adaptation de la gouvernance de Business France concernant l’Export Article 8 passage de la durée des soldes de 6 à 4 semaines Article 9 relèvement des seuils de certification légale des comptes Article 10 accompagnement de la réforme territoriale de l’ordre des experts-comptables Article 11 radiation des fichiers etc. des entrepreneurs à chiffre d’affaires nul pluriannuel Article 12 suppression de l’obligation d’un compte bancaire dédié pour des micro-entrepreneurs Article 13 modernisation du réseau des chambres de commerce et d’industrie Section III Faciliter le rebond des entrepreneurs et des entreprises Article 14 rémunération du dirigeant en redressement judiciaire Article 15 rétablissement professionnel et liquidation judiciaire simplifiée Article 16 sûretés Article 17 publication du privilège du Trésor Article 18 traitement des créances publiques en procédure collective Article 19 clause de solidarité dans les baux commerciaux CHAPITRE II Des entreprises plus innovantes Section I Améliorer et diversifier les financements Article 20 réforme de l’épargne retraite Article 21 renforcer le rôle de l’assurance-vie dans le financement de l’économie Article 22 simplifier l’accès des entreprises au marché financier Article 23 renforcer l’attractivité de la place de Paris Article 24 modernisation des pouvoirs de l’AMF Article 25 infrastructures de marché Article 26 création d’un régime financier des offres de jetons [cryptomonnaies] Article 27 élargissement des instruments éligibles au PEA-PME Article 28 développer l’émission des actions de préférence Article 29 amélioration du dispositif ESUS (Entreprise solidaire d’utilité sociale) [cf. loi ESS 2014-856 du 31/07/2014] Articles 30 à 39 modification de la gouvernance de la Caisse des Dépôts et Consignations (en faveur des territoires) Section II Protéger les inventions et l’expérimentation de nos entreprises Article 40 modernisation du certificat d’utilité Article 41 chercheurs-entrepreneurs Article 42 création d’une procédure d’opposition aux brevets d’invention Article 43 protéger les expérimentations de nos entreprises : véhicules autonomes Section III Faire évoluer le capital et la gouvernance des entreprises publiques et favoriser l’innovation de rupture Articles 44 à 50 transfert de la majorité du capital d’ADP au secteur privé Article 51 transfert de la majorité du capital de la Française des Jeux au secteur privé Article 52 composition du capital d’Engie et de GRTgaz Article 53 ressources de l’EPIC BPI France Article 54  composition du conseil d’administration de La Poste Section IV Protéger nos entreprises stratégiques Article 55 modification du régime de sanction des investisseurs étrangers en France Article 56 actions spécifiques dans les sociétés à participation publique [golden shares] CHAPITRE III Des entreprises plus justes Section I Mieux partager la valeur Article 57 développement et mise en place d’accords de participation et d’intéressement I Suppression du forfait social applicable à l’épargne salariale pour les entreprises de moins de 50 salariés et aux accords d’intéressement pour les entreprises de moins de 250 salariés II Développer la mise en place d’accords de participation et d’intéressement dans les entreprises de moins de 50 salariés III Elargir le champ des bénéficiaires Article 58 favoriser le développement et l’appropriation des plans d’épargne salariale Article 59 stimuler l’actionnariat salarié dans les entreprises privées Article 60 développer l’actionnariat salarié dans les entreprises à capitaux publics Section II Repenser la place des entreprises dans la société Article 61 objet social des entreprises Article 62 administrateurs salariés CHAPITRE IV Diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne, mesures transitoires et finales Article 63 facturation électronique Article 64 insolvabilité Article 65 mobilité des travailleurs entre les Etats-membres Article 66 droits des actionnaires: engagement et transparence des gestionnaires d’actifs et des investisseurs institutionnels / transparence des conseillers en vote / encadrement des transactions avec les parties liées / identification et dialogue avec les actionnaires / encadrement et rémunération des dirigeants Article 67 activités et surveillance des IRP (institutions de retraites professionnelles) Article 68 hiérarchie des créanciers bancaires Article 69 transposition du « paquet Marques » Article 70 ré-évaluation comptables des immobilisations corporelles des grands ports maritimes relevant de l’Etat et des ports de Paris et de Strasbourg Article 71 134 sous-articles de ratifications d’ordonnances, regroupés en XXIII thèmes, concernant des sujets aussi divers que: les émissions obligataires / le régime de résolution pour le secteur de l’Assurance / l’agent de Sûretés / la gestion … Lire la suite

Newsletter AEC du 19 juin 2017

Chers amis Voici notre newsletter AEC du mois de juin. Deux grandes rubriques: vie de l’AEC et publications des membres : I. VIE DE L’AEC I-1. AG 2017 J’ai consulté le CA de l’AEC, afin de déterminer la date la plus favorable, sans obliger les provinciaux à venir spécialement à Paris pour cette réunion, puisque nous avons déjà eu un colloque en 2017 et que nous en aurons un autre le 16 décembre. L’AG aura lieu à Paris vendredi 15 décembre en fin d’après-midi (17 ou 18 h, heure exacte et lieu à fixer), puisque le colloque aura lieu le lendemain, toute la journée et obligera en toute hypothèse la plupart des provinciaux à arriver dès le vendredi Mais l’ordre du jour sera envoyé à l’avance et ceux qui ne pourront venir auront la possibilité de s’exprimer par mail et toutes les suggestions seront présentées lors de l’AG; donc chacun pourra ainsi intervenir, soit par mail à l’avance, soit en présentiel le vendredi 15. I-2. COLLOQUE ACADÉMIE CATHOLIQUE/AEC Comme je l’ai indiqué plusieurs fois, il s’agit d’un colloque, pour nous, un peu exceptionnel. En effet, chaque année l’Académie catholique de France organise un grand colloque annuel (les deux derniers portaient sur la transhumanisme, puis sur les chrétiens en politique). Cette année, je suis le responsable scientifique de ce colloque et il sera organisé par l’Académie avec le soutien de l’AEC. C’est donc pour nous une opportunité importante. Le colloque aura lieu aux Bernardins le samedi 16 décembre de 9 h 30 à 18 h. Le thème en sera ” La Doctrine sociale de l’Église face aux mutations de la société”. Il s’agit d’examiner les mutations récentes que la DSE devra mieux prendre en compte, à propos des corps intermédiaires et de la subsidiarité, des questions théologico-politiques et des droits de l’homme, mais aussi de l’entreprise, du marché du travail, des questions monétaires et financières, de l’écologie ou des mouvements migratoires. Le colloque se déroulera sous la présidence effective du cardinal Turkson, Président du dicastère “Pour le service du développement humain intégral”. Ce colloque organisé par l’Académie catholique sera soutenu, outre par l’AEC, par le collège des Bernardins, l’université catholique de Lyon et l’Institut catholique de Paris. Il faut donc faire de la place à tous ces partenaires, mais c’est néanmoins l’AEC qui aura le plus d’intervenants, 5 en tout ( P. de Lauzun, G. Hülsmann, J. Bichot, JD Lecaillon et moi-je vais assurer la conclusion et synthèse du colloque). Il y aura bien sûr une publication et, à la suite du colloque, un texte sera discuté et adopté par l’Académie pour être “envoyé à l’Église universelle”. L’enjeu n’est donc pas mince. Merci de noter et bloquer cette date. I-3. COTISATIONS Après avoir, pendant trois newsletter, lancé un appel à cotisation, je me suis lancé dans des relances personnalisées auprès de ceux qui n’avaient pas encore réglé leur cotisation: trois relances successives. Avec un succès bien médiocre! Je n’en dis pas plus, mais que ceux qui ont reçu ces diverses relances veuillent bien, s’ils souhaitent continuer à faire partie de l’AEC, envoyer dès que possible leur cotisation: l’AEC a de nombreux frais cette année, avec une grosse publication et deux colloques: nous avons besoin de l’appui de tous. I-4. QUESTIONS DIVERSES Certains membres me demandent s’il serait possible de reprendre les rencontres AEC pour ceux qui habitent la région parisienne; cela fait partie des nombreuses questions à aborder lors de l’AG du 15 décembre. D’une manière plus générale, envoyez-moi la liste des points que vous souhaitez qu’on mette à l’ordre du jour de cette AG. J’ai déjà noté les diverses suggestions envoyées par les membres du CA. II PUBLICATIONS DES MEMBRES II-1 OUVRAGES La précédente newsletter avait été consacrée aux quatre ouvrages publiés par l’AEC; merci à ceux qui en ont commandé; pour les autres, il n’est pas trop tard. Je rappelle seulement la dernière publication, qui comprend 12 communications de membres de l’AEC : “Liberté économique et bien commun“.Par ailleurs, je viens de publier, toujours aux PUAM, les actes du colloque d’éthique économique de l’an dernier “Moralité et immoralité des revenus“. Je signale que, parmi les intervenants, on compte plusieurs membres de l’AEC: Pierre Garello, François Facchini, Guido Hülsmann, Pierre de Lauzun et moi : II.2 ARTICLES DES MEMBRES DE L’AEC Comme habitude, je précise d’une part que ces articles n’engagent pas l’AEC en tant que telle, d’autre part que je ne peux faire état que des articles qu’on a bien voulu me signaler. II.2-1 François FACCHINI: Facchini, François, Benjamin Michallet and Giuseppe Lucio Gaeta 2017d. Who cares about the environment? An empirical analysis of the evolution of political parties’ environmental concern in European countries (1970-2008), Land Use Policy, 64: 200-211, http://dx.doi.org/10.1016/j.landusepol.2017.02.017 Facchini, François 2017c. Retour sur les Péchés Secrets de la Science Economique selon Deirdre N. McCloskey et la controverse provoquée par le « négationnisme économique et comment s’en débarrasser », La Vie des Idées. Publié le 07 mars 2017 en ligne. http://www.laviedesidees.fr/L-economie-rhetorique-moderne.html Facchini, François 2017b. L’entrepreneur Politique. Dictionnaire économique de l’entrepreneur, André Tiran et Dimitri Uzunidis (éds), collection Bibliothèque de l’économiste, numéro 11, Paris, Garnier, Classique. Facchini, François, Mickael Melki and Andrew Pickering, 2017a. The Labor Share and the Size of Government, Oxford Bulletin of Economics and Statistics, 79, 2, april, pp.251-275. Version of Record online: 25 JUN 2016, DOI: 10.1111/obes.12140 Facchini, François 2016c. Entrepreneur et développement économique, Regards Croisés sur l’économie, 2, n° 19, p. 41-53. DOI 10.3917/rce.019.0041, http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=RCE_019_0041 Facchini François 2016b. The Hayek-Keynes Macro Debate Continues, Editorial, Journal des Economistes et des Etudes Humaines, Volume 22, Issue 1, Pages 1–13, ISSN (Online) 2153-1552, ISSN (Print) 2194-5799, DOI: 10.1515/jeeh-2016-0012, July 2016. http://www.degruyter.com/view/j/jeeh.2016.22.issue-1/jeeh-2016-0012/jeeh-2016-0012.xml?format=INT Facchini, François 2016a. Political Ideological Change: a theoretical approach, Social Science Information, 55, 4, December, 589-602. http://ssi.sagepub.com/content/early/2016/07/07/0539018416658149.abstract II-2-2 Laurent BARTHÉLEMY L’entreprise et les valeurs – 1: philosophies de la valeur L’entreprise et les valeurs -2: la Doctrine sociale de l’Église et les valeurs L’entreprise et les valeurs -3: les théories économiques de la valeur L’entreprise et les valeurs- 4: les valeurs d’entreprise, et Conclusion générale L’entreprise et les valeurs-5: petite bibliographie … Lire la suite

Colloque “Économie et lien social”, samedi 25 mars 2017

L’AEC coorganise, avec Amitié-Politique, un colloque auquel elle a le plaisir de vous inviter, le samedi 25 mars 2017 de 14 h 30 à 18 h 30, à PARIS Lieu : ASIEM, 6 rue Albert-de-Lapparent 75007 Paris (Métro 10 Ségur ou 6 Sèvres-Lecourbe ou 13 Saint-François-Xavier) dans un amphi confortable ! Thème: “Économie et lien social”. Conférence introductive par Mgr de Moulins-Beaufort, évêque auxiliaire de Paris. Au programme : Conférences, tables rondes, échanges et débats Avec : Mgr Éric de Moulins-Beaufort (évêque auxiliaire de Paris), François de Lacoste-Lareymondie (Président d’Amitié-Politique), Pierre Deschamps (fondateur de CapitalDon), Pierre-Yves Gomez (‎économiste), Joseph Thouvenel (vice-président de la CFTC), Jean-Baptiste de Foucauld (ancien commissaire au plan et coordinateur du « Pacte Civique »), Pierre de Lauzun (économiste), Jean-Yves Naudet (économiste, président de l’AEC), Jacques Bichot (économiste et membre fondateur d’Amitié-Politique)…. Inscription préalable obligatoire et gratuite avec le lien suivant (même si le lien parle de paiement, c’est bien gratuit) : Billetterie : Colloque : Économie et lien social

Séminaire sur “Finance et monnaie” le 1er décembre 2018

Conformément à la décision prise par le Conseil d’Administration ayant suivi l’AG du 7 avril 2018, l’AEC organise un séminaire , ouvert aux seuls membres de l’AEC (y compris les personnes désireuses d’y adhérer), sur le thème “Finance et monnaie”. D’abord prévu le 27 octobre 2018, il a été reporté au 1er décembre 2018, à Paris (lieu à préciser, probablement la faculté Paris-II-Panthéon-Assas). L’horaire envisagé est 10 h à 16 h. La base de travail est le document “Œconomicae et pecunariae questiones (Questions économiques et financières, en latin)“, du 6 janvier 2018, publié le 17 mai 2018 Plusieurs membres de l’AEC ont déjà commenté cette publication du Saint-Siège, notamment le précédent et l’actuel présidents de l’AEC :– Jean-Yves Naudet, dès le 18 mai 2018, puis le 23 mai 2018 ;– Pierre de Lauzun, le 21 mai 2018. Les inscriptions et les textes présentés sont à adresser à Pierre de Lauzun (président) et/ou Hervé Magnouloux (secrétaire). Le programme des interventions est, à ce jour, le suivant : – Laurent Barthélemy sur la financiarisation et ses dérives, dans Oeconomicae et Pecunairiae quaestiones. – Jacques Bichot sur monnaie, crédit et la finance pour l’organisation de la vie en société. – Guido Hülsmann “L’interventionnisme monétaire dans la Doctrine sociale de l’Église”. – Bernard Largillier “Évangélisation et développement économique”. – Pierre de Lauzun sur la finance de marché dans Oeconomicae et Pecunairiae quaestiones. – Jean-Yves Naudet sur Fiscalité et dette publique dans Oeconomicae et Pecunairiae quaestiones. – Stanislas Ordody sur “Proposition : le financement 4P”

Convocation à l’assemblée générale de l’Association des Économistes Catholiques

Chères et Chers Membres de l’Association des Économistes Catholiques J’ai l’honneur de vous convier à l’assemblée générale annuelle de l’association qui se déroulera à distance le samedi 5 décembre 2020 à 10 heures. Le lien de connexion vous sera communiqué ultérieurement. Ordre du jour : Approbation des comptes de 2020 et du rapport financier Fixation du montant de la cotisation pour 2021 Approbation du rapport moral Discussion sur les projets pour 2021 Changement d’adresse du siège de l’association Je vous rappelle que tous les adhérents peuvent participer à l’Assemblée Générale. Seuls ceux qui sont à jour de leur cotisation ont le droit de vote (il est possible de s’acquitter de sa cotisation jusqu’au jour de l’Assemblée Générale). La cotisation est de 15 € ou plus, à l’ordre de l’AEC (reçu fiscal à partir de 40 €). Il est souhaitable de payer les cotisations par virement pour simplifier les démarches administratives. Je vous serais gré de bien vouloir me confirmer votre présence, ou de m’adresser le pouvoir en document attaché, dûment complété et signé, si vous ne pouvez participer à la réunion. Veuillez agréer, chères amies et chers amis, l’expression de toute ma considération Hervé Magnouloux Secrétaire général de l’Association des Économistes Catholiques

Michel Lelart : Pourquoi Benoît XVI parle-t-il de la microfinance dans Caritas in Veritate ?

Résumé :Au mois de juin 2009, le pape Benoît XVI a publié une encyclique Caritas in Veritate, dans laquelle il évoque à deux reprises le microcrédit et la microfinance. Ces références peuvent étonner. C’est la première fois qu’elles apparaissent dans une encyclique. Nous avons cherché à en comprendre les raisons. D’une part, la microfinance permet de réduire la pauvreté, ce qui est un souci de l’Eglise depuis toujours, comme de développer l’activité à travers l’initiative économique, ce qui est devenue pour elle une préoccupation. D’autre part, la microfinance est un secteur qui respecte la subsidiarité, qui n’est pas étranger au bien commun, et qui s’ouvre à la solidarité, trois des grands principes de la doctrine sociale de l’Eglise. Elle est aussi une finance de proximité, et en cela elle respecte la diversité des cultures comme le Pape le souhaite. Mots clés :  Code JEL : M14 – O17 – Z12 ——————— Abstract : “Microfinance” in the papal encyclical Caritas in Veritate : Why ? In June 2009, Pope Benedict XVI published an encyclical entitled Caritas in Veritate in which he twice mentions “microcredit” and “microfinance”. These references may appear surprising since this is the first time that they are introduced in a papal encyclical. This paper provides an explanation for the introduction of these two references. Firstly, microfinance has a goal of reducing poverty, which has always been a major concern of the Church, as well as the goal of developing individual action by way of economic initiative, which recently has become a major preoccupation of the Church. Secondly, microfinance is based on the principles of common good, subsidiarity and solidarity, three major principles in the Church’s social doctrine. Moreover, microfinance is based on the principle of proximity, which is in line with the notion of cultural diversity, which, in turn, is in conformity with the Pope’s desideratum. Key words : Social doctrine of the Church, Caritas in Veritate, microfinance, micro-credit Code JEL : M 14 – O 17 – Z 12 La dernière lettre encyclique du Pape Benoît XVI publiée le 29 juin 2009 « Caritas in Veritate » était annoncée comme une encyclique sociale. Plusieurs encycliques du même genre l’avaient précédée. La première est celle de Léon XIII sur la condition des ouvriers Rerum Novarum en 1891, alors que la révolution industrielle bat son plein et que Marx l’analyse à sa façon. La deuxième est celle de Pie XI sur le capitalisme Quadragesimo Anno en 1931, alors que le capitalisme connaît sa première grande crise que Keynes va s’efforcer d’expliquer quelques années plus tard. Viennent ensuite de Jean XXIII Mater et Magistra en 1961 sur les récents développements de la question sociale et Pacem in Terris en 1963 sur la paix entre les nations, puis en 1967 Popularum Progressio de Paul VI qui affirme que la question sociale est devenue mondiale et qui plaide pour un développement intégral de l’homme et un développement solidaire de l’humanité. Ce sont enfin trois encycliques de Jean-Paul II : Laborem Exercens en 1981 sur l’homme au travail, Sollicitudo Rei Socialis en 1987 sur les conditions et la nature d’un vrai développement, Centesimus Annus en 1991 qui marque le centième anniversaire de Rerum Novarum et qui plaide pour une société digne de l’homme. Ces textes constituent la doctrine sociale de l’Église catholique 2 . Elle repose sur quelques principes essentiels que Léon XIII a posés dès Rerum Novarum et qui n’ont jamais varié depuis. Le premier est sans conteste l’intangible dignité de la personne humaine, qui entraîne, nous le verrons, la subsidiarité, la solidarité et le bien commun (Compendium, n°160)3. D’autres principes s’en déduisent, en particulier la destination universelle des biens et l’option préférentielle pour les pauvres. Mais ce sont les quatre premiers qui sont les véritables fondements d’une doctrine qui s’est sans cesse adaptée aux problèmes contemporains… et les problèmes ont changé depuis la fin du XIXe siècle. L’encyclique de Benoît XVI s’inscrit parfaitement dans cette évolution. C’est toujours la même doctrine sociale, mais deux choses ont changé. La première est que cette encyclique n’est pas que sociale. Elle est aussi théologique, philosophique, voire même anthropologique. C’est pourquoi elle est si difficile à lire – au fil des pages on y rencontre le prix, le marché, les matières premières, l’entreprise, les syndicats… en même temps que la charité, la justice, la vérité, le bien commun, la liberté et, bien sûr, l’amour de Dieu… C’est aussi pourquoi elle est considérée comme un texte majeur dont la portée apparaît considérable à certains. Le second changement, plus naturel celui-là, concerne l’adaptation de l’encyclique à l’actualité. Le passage à l’international s’est fait avec Populorum Progressio, la mondialisation a été prise en compte avec Centesimus Annus, la nouveauté cette fois concerne l’environnement et, du fait de la crise, la finance… et tout particulièrement la microfinance. On peut s’étonner de cette dernière intrusion dans une encyclique consacrée à l’Amour dans la Vérité ! A vrai dire, ce qu’en dit Benoît XVI n’est pas très original. Il parle de la microfinance à deux occasions. – Dans le chapitre 4 intitulé « Développement des peuples, droits et devoirs… », le Pape affirme que « pour fonctionner correctement, l’économie a besoin de l’éthique » (n° 45). Et il pense que cela est également vrai de la finance qui peut plus facilement s’ouvrir à l’éthique à travers le microcrédit et, plus généralement, la microfinance. Il ne s’agit pas là de n’importe quelle éthique, mais d’une éthique « amie de la personne », qui repose sur « la dignité inviolable de la personne humaine, de même que sur la valeur transcendante des 2 normes morales naturelles » (n°45). L’économie – et la finance – ont donc besoin de morale et la microfinance apparaît comme une voie privilégiée. C’est pourquoi, ajoute Benoît XVI, « ces processus sont appréciables et méritent un large soutien ». – Dans le chapitre suivant consacré à la collaboration de la famille humaine, le Pape passe en revue les domaines où pourrait s’exercer une plus grande solidarité, et il aborde … Lire la suite

L’héritage culturel de l’inflation par décret, par G. Hülsmann

Jörg Guido Hülsmann propose, dans « L’éthique de la production de monnaie », une intéressante synthèse entre l’économie politique de la monnaie, la philosophie réaliste et la théologie catholique. Il aborde la compatibilité entre les préceptes moraux chrétiens et diverses constitutions monétaires, les conséquences de l’inflation permanente sur le plan de la spiritualité, les causes des crises monétaires et financières ainsi que l’utilité de la politique monétaire. Ce chapitre a été publié dans l’AGEFI le 8/10/2010 ainsi que, sous le titre « L’héritage culturel et spirituel de l’inflation forcée » et dans une traduction légèrement différente, dans la revue Kephas (avril-juin 2006). Powered By EmbedPress

Dépénalisation des drogues : ce qu’en dit l’économie

Article de Jacques Garello publié le 5 mai 2016 sur Contrepoints (rubrique Libertés publiques) L’analyse économique de la dépénalisation des drogues est limpide. Contre l’évidence économique, la consommation de drogue peut-elle être freinée par la prohibition ? By: aeroSoul – CC BY 2.0 Les déclarations de Jean-Marie Le Guen, président du groupe socialiste à l’Assemblée, qui exerçait naguère la profession médicale, ont ouvert un débat sur la dépénalisation des drogues qui divise le gouvernement, mais aussi l’opinion publique. On ne peut ramener le débat sur la dépénalisation des drogues, comme le font certains, à un choix entre pour ou contre la drogue. Je crois que Le Guen est tout à fait hostile à la consommation de cannabis, mais il se demande, comme bien d’autres, si la prohibition est le meilleur remède à ce terrible fléau. On ne peut pas davantage le ramener à un choix entre pour ou contre la liberté. À la différence des libertariens, et à titre personnel, je suis hostile à la drogue, à l’avortement, à l’euthanasie, à la gestation pour autrui, parce que je professe que la liberté a pour noble mission de développer la dignité de la personne humaine, et non de l’avilir. Que quelqu’un fasse un indigne usage de sa liberté, ce choix est lamentable mais je n’ai pas à l’interdire. Que la loi interdise est une autre question, le législateur est souvent mal inspiré ; on le voit à propos du projet délirant de pénaliser lourdement les clients des prostituées. La prohibition aux États-Unis Je crois ce préambule indispensable pour exposer, en toute sérénité, ce qu’est l’analyse économique de la prohibition. Elle est née des leçons tirées par les Américains après la prohibition de l’alcool dans les années vingt (1919-1933). Plusieurs économistes, dont Roger Leroy Miller, ont analysé les effets pervers de cette prohibition : le marché noir de l’alcool est immédiatement apparu, il a été organisé par les gangsters, et la mafia en particulier, il a débouché sur le crime, la corruption dans la police, la politique. l’alcool frelaté distribué en très grande quantité a causé décès et handicaps, frappant plus durement les consommateurs pauvres, les riches ayant les moyens d’acheter le bon alcool. Alcool et drogue Cette analyse peut-elle être validée pour la drogue ? Je crois que la distinction entre drogues douces et dures est contestable, s’il est vrai qu’un jeune sur quatre aura fumé un joint mais sans addiction, il n’en demeure pas moins que l’on passe parfois à l’étape suivante. Dans ces conditions, il est déraisonnable de considérer la consommation de cannabis comme une mode sans lendemain, ou l’expérience d’un soir. En fait, la drogue pose un problème plus aigu que l’alcool, c’est le prosélytisme. Nombre de buveurs américains n’avaient pas besoin des trafiquants pour se saouler, ils le faisaient avant la prohibition. En revanche, les trafiquants de drogue organisent bien leur affaire : d’une part ils distribuent les premières doses gratuitement et les jeunes y prennent vite goût et seront des clients fidèles ; d’autre part ces clients se transformeront en dealers pour se procurer l’argent dont ils ont besoin pour se droguer eux-mêmes. Les trafiquants, eux, se gardent bien d’une telle imprudence. C’est donc la diffusion de la drogue, et dans des milieux stratégiques, comme les écoles et lycées, qui est encore plus inquiétante que la consommation de drogue. Pourquoi une analyse « économique » de la dépénalisation des drogues ? Parce que l’économie prend en compte la logique des comportements et de l’action humaine. La prohibition crée la pénurie. L’offre du produit rare engendre des bénéfices substantiels. Elle attire des producteurs sans scrupule, l’argent sale encourage les trafiquants, et les bénéfices sont encore plus élevés s’il y a un monopole local (d’où les fusillades marseillaises). La pénurie disparaîtrait si la concurrence des producteurs parvenait à saturer le marché avec des prix abordables. Mais les débouchés peuvent s’élargir grâce au prosélytisme, de sorte que la rente des producteurs se maintiendra. Enfin la drogue a l’avantage d’être un produit facile à transporter, à cacher, à distribuer : tandis que l’alcool appelait une organisation complexe et coûteuse, à la seule portée de grandes entreprises de gangsters. La drogue circule dans des réseaux très restreints, avec des micro-trafiquants. Le poison peut ainsi se propager dans tous les lieux, tous les milieux. La drogue se socialise, bien que l’autoproduction de cannabis ait fait son apparition. Et la prévention ? Je ne sais si cette analyse économique aura convaincu ceux qui ne la connaissaient pas. Mais elle donne à réfléchir et à mon sens mérite d’être sérieusement prise en compte dans le débat sur la prohibition. Elle a pourtant des limites car la prévention est toujours préférable à la répression : c’est non plus du côté de l’offre mais du côté de la demande qu’il faudrait agir, une solide éducation écarterait la jeunesse des démons tentateurs et des rêves éphémères.

Jacques Garello – Comment lire l’encyclique de Benoît XVI ?

La lettre encyclique « Caritas in Veritate » peut se lire de deux façons, ce qui explique la diversité des commentaires parus à ce jour. Les uns ont été intéressés par l’analyse de l’économie mondialisée et des perspectives qu’elle offre pour les pays pauvres, les autres ont retenu avant tout un message d’éthique économique. Je crois que les uns et les autres ont raison. D’après ma mesure, le texte de Benoît XVI fait une part égale aux deux versions. L’introduction, le chapitre premier, ainsi que le chapitre six et la conclusion sont surtout œuvres d’évangélisation, les quatre chapitres au cœur de la lettre traitent principalement de la mondialisation et du développement. La référence permanente à Popularum Progressio ferait plutôt pencher vers une lecture très actualisée du texte, mais le propos essentiel n’est-il pas de proposer aux catholiques et aux hommes et femmes de bonne volonté les lumières de la foi et de la raison ? C’est d’ailleurs l’un des mérites – mais aussi l’une des difficultés – de la doctrine sociale de l’Église que de rappeler les permanences spirituelles et théologiques lorsque le monde est confronté aux « choses nouvelles » : Léon XIII s’exprimait sur la « question ouvrière », Paul VI sur le drame du sous-développement, Jean Paul II sur la fin du communisme. Cette mission du magistère est d’ailleurs rappelée avec insistance par Benoît XVI : La doctrine sociale de l’Église éclaire d’une lumière qui ne change pas les problèmes toujours nouveaux qui surgissent (§12). Le Pape parle d’une fidélité dynamique. Le problème nouveau : la mondialisation en crise ? Les économistes et autres experts en sciences sociales sont plutôt portés à s’interroger sur le tableau du monde présent, sur les enseignements de la crise qu’il traverse et sur la suite à donner. Le texte est ici d’une grande prudence, parfois même d’une extrême difficulté d’appréciation. Voilà pourquoi partisans et adversaires du libéralisme peuvent tirer argument de quelques phrases sorties de leur contexte. Les dirigistes et sociaux démocrates crient victoire lorsque l’encyclique appelle l’État à intervenir de façon plus pressante (§ 24 et 41), et appelle de ses vœux une organisation mondiale de l’économie (§57), mais ils en oublient que le rôle de la société civile est aussitôt souligné (§24) et que les erreurs, abus des institutions internationales sont dénoncés (§43 et 47) et qu’une gouvernance mondiale devrait être de nature subsidiaire (§57). Les libéraux se réjouissent de voir le contrat et le marché totalement réhabilités (§ 35 et 36) sur la base de la justice commutative (§6) et le protectionnisme condamné (§42), mais ils peuvent s’inquiéter d’une irruption de la gratuité dans les échanges marchands (§36) ou de l’évocation d’entreprises à but non lucratif (§46). Si l’encyclique reprend quelques idées à la mode sur les sources d’énergie et l’épuisement des ressources naturelles, allant même jusqu’à prôner une planification de leur usage (§49), le néo-paganisme des écologistes est ouvertement condamné (§48), ainsi que leur néo-malthusianisme (§50). Pour ramener les passages du texte à leur juste valeur il serait utile de tenir compte de trois éléments 1° L’observation d’un monde en mutation n’est pas facile, parce que les eaux sont mêlées. Par exemple, si la crise actuelle est due à l’imprudence de certains financiers trop pressés de réaliser des opérations très profitables, les responsabilités des institutions publiques, y compris des banques centrales, sont considérables. Si le libre échange est réalisé pour beaucoup de produits et services, il ne l’est pas pour les produits agricoles. Si les gouvernants dénoncent le dumping fiscal, le dumping social et les délocalisations, c’est parce que leurs législations et leurs impôts ont rendu la vie impossible aux entrepreneurs, et parce qu’ils ne veulent pas renoncer à des dépenses qui représentent souvent gaspillages et prébendes. Si le chômage s’accroît, c’est sous l’effet des rigidités du marché du travail, et de l’assistanat dans lequel on entretient les chômeurs (qui très vite vont pâtir financièrement et psychologiquement des subsides de l’État providence). 2° L’encyclique n’a pas voulu revenir à ce qui est définitivement acquis dans la doctrine sociale de l’Église, en particulier le principe de la propriété privée et la condamnation du socialisme, la liberté d’entreprendre et le droit à l‘initiative, l’articulation de la justice commutative et de la justice distributive. Benoît XVI rappelle la cohérence du corpus doctrinal (§12), hérité des Apôtres, des Pères de l’Église et des Grands Docteurs. 3° Globalement, le diagnostic de l’encyclique est clair : la mondialisation est favorable au développement des pays pauvres, elle est l’occasion de réunir la famille humaine dans la fraternité, pour peu que les hommes veuillent bien accompagner cette mondialisation d’un supplément d’âme, pour peu que l’on accepte la vérité de l’amour du Christ dans la société. C’est précisément ce dernier message qui, à mes yeux, constitue le corps de l’encyclique, tout le reste n’étant que constats prudents, pistes de recherche et parfois même vœux pieux. Je pense que l’important est d’aller à l’essentiel et de retrouver le lien qui fait remonter la mondialisation et le développement à l’éthique et à l’Évangile. Responsabilité personnelle et carences institutionnelles Reprenant le thème de Paul VI, Benoît XVI place l’homme au cœur du processus de développement économique, dont il est à la fois l’acteur et le bénéficiaire. Bénéficiaire dans la mesure où le développement signifie l’élimination de la faim, de la maladie et de l’analphabétisme (§21), mais aussi le développement intégral de l’homme (§11). Acteur parce que le développement exige que tous prennent leurs responsabilités de manière libre et solidaire (§11) ; il n’est pas simplement offert au titre d’un droit au développement (§11). Citant Paul VI : Chacun demeure, quelles que soient les influences qui s’exercent sur lui, l’artisan principal de sa réussite ou de son échec (§17) Benoît XVI conçoit le développement comme la réponse à une vocation, qui demande à l’être humain de se hisser à la hauteur de sa personnalité et de l’amour du Christ. Comme Jean Paul II l’avait déjà souligné, la ressource humaine est le véritable capital qu’il faut faire grandir afin d’assurer … Lire la suite